Entretien avec Guillaume Rall, président du Syndicat National des Masseurs Kinésithérapeutes Rééducateurs (SNMKR)

"Ne pas recourir aux kinés pour soulager le système est un non-sens"

💬 Les urgences et services pédiatriques sont en difficulté pour faire face à l’épidémie de bronchiolite. Pouvez-vous rappeler le rôle des kinésithérapeutes libéraux dans la prise en charge en ville de ces jeunes patients ?

Le kinésithérapeute est compétent pour prendre en charge les pathologies respiratoires des adultes, des enfants et des nourrissons. Le recours à l’hôpital est indiqué pour les cas graves. C’est justement le rôle du kinésithérapeute d’évaluer cette gravité, puis de déboucher le nez et faciliter la respiration de l’enfant, de répondre aux questions des parents et de leur apprendre à moucher leur bébé. L’enjeu pour ces parents est donc d’aller au bon endroit : chez le kinésithérapeute dans la grande majorité des cas, à l’hôpital en cas de situation grave.

Malheureusement, une recommandation de la Haute Autorité de santé (HAS) en 2019, a été mal interprétée. Faute de littérature suffisante sur le désencombrement bronchique, celui-ci n’a pas été recommandé pour un premier épisode de bronchiolite chez l’enfant de moins d’un an. Les pouvoirs publics en ont déduit que la kiné respiratoire n’était plus utile, certains médecins en ont moins prescrit, et le flux de patients s’est reporté sur l’hôpital ! Cette situation est absurde.  

💬 Des réseaux d’acteurs libéraux, en Ile-de-France notamment, ont pourtant fait leurs preuves dans la prise en charge de cette épidémie hivernale. 

Oui, ces réseaux qui sont financés par les pouvoirs publics via les agences régionales de santé (ARS), ont effectivement démontré leur efficacité avec des kinés présents, qui prennent en charge rapidement les enfants pour les moucher, les surveiller quotidiennement. Ils sont malheureusement beaucoup moins sollicités depuis 2019.

D’autres organisations comme les communautés professionnelles de territoire de santé (CPTS) peuvent s’emparer du sujet, et c’est très bien. A l’image de la CPTS Monts du Lyonnais qui vient de communiquer sur un protocole de coopération entre kinésithérapeutes et médecins généralistes, pour prendre en charge efficacement les nourrissons en ville. 

Les kinésithérapeutes sont compétents en la matière, disponibles, et savent s’organiser. Ne pas recourir aux kinés pour soulager le système est un non-sens.

💬 Cet épisode sanitaire souligne-t-il des besoins de formation des différents professionnels de santé ? 

Un besoin d’information des pouvoirs publics et des autres professionnels de santé sur l’activité des kinés en matière de bronchiolite, c’est certain !  

Pour ce qui est de la formation continue des professionnels, c’est un enjeu majeur toute l’année. Les compétences des uns et des autres évoluent, chacun doit actualiser ses connaissances en continu. 

La compétence des professionnels de santé à travailler ensemble doit aussi être renforcée ; c’est l’une des missions des CPTS. 

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