💬 Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous expliquer pourquoi avez-vous ressenti le besoin de partager vos connaissances sur l'eczéma ?
Je suis une ancienne interne des hôpitaux de Paris. Quand je me suis installée, j'ai compris que ce n'était pas suffisant, donc j'ai continué à me former en psychanalyse et en micronutrition. Il y a une quinzaine d'années, j'ai découvert la pédagogie à travers l'éducation thérapeutique dans l'eczéma. Et c'est ces quatre casquettes qui, un jour, se sont imbriquées comme dans un puzzle et que j'ai mis au service de l'eczéma parce que, petit à petit, je me suis rendue compte de l'ampleur des souffrances des patients atopiques, des petits, de leurs parents, des adultes. Quelles étaient les causes des soignants qui n'étaient absolument pas formés pour être à la hauteur de l'enjeu, qu'elles étaient toutes les rumeurs, les pensées magiques, les pensées binaires qui circulent, surtout depuis les réseaux sociaux, depuis qu'ils existent, et en même temps, quelle était la place tellement symbolique de la peau dans toutes nos relations humaines ? Donc j'ai réussi, j'en sais rien, mais j'ai essayé de combiner un peu tout ça autour de l'eczéma.
💬 Quels sont, selon vous, les grands enjeux autour de la prise en charge de l'eczéma ?
J'ai identifié trois grands enjeux. Le premier, c'est indubitablement la formation des médecins, des soignants en général, parce que les pharmaciens, c'est pareil, nous ne sommes pas assez formés à l'ampleur du problème.
Deuxièmement, c'est la formation à l'attitude éducative, parce que nous sommes formés avec un langage scientifique et nous ne sommes pas formés du tout à faire comprendre les notions scientifiques aux patients. Je dirais, les plus attentionnés d'entre nous prennent le temps d'expliquer, mais expliquer et faire comprendre, ce n'est pas du tout la même dimension, puisqu'on va faire participer le patient quand on se fait comprendre.
Et le troisième enjeu, c'est de diffuser le plus possible, transmettre sur des réseaux actuels, sur les moyens de diffusion actuels, des informations fiables sur lesquelles les patients et les parents des petits vont pouvoir réellement s'appuyer et pour pouvoir contrecarrer toutes ces pensées binaires qui inondent tous les médias et tous les réseaux et qui ne servent à rien.
💬 Et quel regard, justement, portez-vous sur l'interdisciplinarité dans la prise en charge ? Quel est votre regard sur toutes les professions qui interviennent ?
Elle est absolument fondamentale. Ce n'est plus possible actuellement même de faire de la formation, de l'information et du travail sans être en commun et de pouvoir avoir le même discours entre la porte d'entrée et la porte de sortie. En vrai, la porte d'entrée, c'est le généraliste. Le dernier soignant à être vu, c'est le pharmacien. Et quand on a des discours très discordants entre les deux, c'est certain que le patient va être perdu, sinon assez en colère, qu'on ne soit pas alignés sur un même discours qui, forcément, est le sien.
Le patient a besoin de réponses à des questions dont il n'a même pas conscience, qui, en fait, sont sous-jacentes. C'est-à-dire qu'un être humain qui devient malade, quel qu'il soit, on ne parle pas forcément d'eczéma, a un sentiment d'injustice. Pourquoi c'est moi ? Quand c'est des jeunes parents que c'est leur bébé, c'est encore plus injuste. Et les questions, c'est pourquoi c'est là ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal ? Il y a toujours de la culpabilité quant à l'enfant malade. Ça va durer combien de temps ? Et ainsi de suite.
Et quelque part, si on était simplement avertis qu'en quelques secondes, ce que je viens de dire, on peut amener une réflexion autre sur la maladie et donc sur le patient, déjà, les parents sont soulagés et déculpabilisent.
Ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'on voit de partout des réflexions sur la quête de soins, sur le parcours de soins du patient. Bien sûr, il cherche des soignants parce qu'il en manque de partout, mais surtout dans une maladie comme l'eczéma, le patient ne cherche pas, il n'est pas en quête de soi, il est en quête de sens, c'est-à-dire qu'il veut comprendre. Et à partir du moment où il a fait comprendre, les soins, il va les comprendre par lui-même et il ne sera plus opposé à dire pourquoi il faut que je mette un truc qui colle, qui est cher, qui pue. Je ne comprends pas pourquoi il faut que je mette de la crème au quotidien.
Donc, bien être dans, comment dire, synchro avec la demande du patient, ça permet, du coup, d'être dans une alliance thérapeutique qui n'existe pas beaucoup en ce moment.
💬 Et si vous deviez résumer en une phrase votre conseil aux professionnels de santé sur la prise en charge de l'eczéma, que diriez-vous ?
Expliquer, c'est bien. Faire comprendre, c'est mieux. Il faut apprendre les deux, c'est-à-dire la partie scientifique et avoir cette capacité à faire comprendre avec des mots très simples, et les mots très simples, ce sont des métaphores. C'est-à-dire que les métaphores, ce sont des conceptions que nous partageons tous. Déjà, conception, c'est un mot compliqué.
Je vais prendre un exemple. On donne le conseil au patient de ne pas prendre de douche bouillante parce que ça abîme sa peau. En fait, il le sait, mais il ne comprend pas pourquoi. Vous lui expliquez que quand vous n'avez pas de produits vaisselle et que vous allez dégraisser votre plat gratin avec de l'eau bouillante, c'est une métaphore. Il comprend tout de suite que la même image s'applique à sa peau. Donc, utiliser constamment des réflexions par rapport à notre vie de tous les jours, qui fait qu'on va réellement se comprendre.
💬 C'est ce que vous proposez dans les contenus sur Invivox ?
Invivox est un excellent moyen de diffuser une information fiable et en transversal. En référentiel de tout ça, je vous propose une petite visite de mon site : www.mag-da.fr. Ça veut dire méthode d'apprentissage globale dans la dermatithétopie où je mélange tout, c'est-à-dire l'allopathie, le micronutritionnel. La psychanalyse, c'est un bien grand mot. C'est l'émotionnel, le psychologique et la pédagogie, c'est-à-dire la façon de le faire comprendre.
Propos recueillis par Marine Dalle - Content manager chez Invivox et ergothérapeute.